Les outils et créations numériques donnent lieu à des activités d’apprentissage. Ils peuvent être une première initiation à la programmation, support de modélisation pour des collégiens, de création artistique ou favoriser le développement de compétences linguistiques en anglais.
Voici ci-dessous les résumés des communications de l’atelier.
H1 – Des objets programmables à l’école. Pour quelle technicité ? – Olivier Grugier, Université Paris Descartes, ESPE de l’académie de Paris, Université Sorbonne Université, EDA.
Les programmes de l’école laissent une place à l’apprentissage de l’informatique. Différents objets programmables sont, dans ce cadre, proposés et introduits dans les classes. Komis et Misirli (2011) montrent qu’avec un scénario défini par des chercheurs, les enseignants Grecs permettent aux élèves de développer l’apprentissage de l’informatique à travers l’usage de robots de types Beebot©. Beziat (2017) confirme ces résultats tout en mettant en évidence un ensemble de contraintes de mise en œuvre et de compréhension techniques sur le fonctionnement de ces robots. Si chez les élèves les dimensions de manipulation et d’observation de résultats par rapport à un déplacement cinétique semblent acquises, en revanche les dimensions de fonctionnement et de traitement des données par le robot ne semblent pas reliées. De plus, des difficultés de prise en charge des robots par les élèves sont soulevées (Grugier et Villemonteix, 2017). Ces objets programmables, d’apparence simple au niveau de l’usage, sont finalement peut-être plus complexes et nécessitent un niveau de technicité supérieur à ce qui est envisagé initialement.
Cette contribution, inscrite dans le projet ANR DALIE, propose, à partir de l’analyse de moments d’enseignement-apprentissage, de montrer en quoi ces objets programmables peuvent favoriser la construction de référents empiriques d’une culture technique par les rencontres que vivent les élèves à l’école. L’introduction de ces objets programmables à l’école est-elle l’occasion d’acquérir un niveau de technicité comme élément de base d’une culture technique (Martinand, 2014) ?
Ces robots sont programmables à partir d’un pupitre intégré, composé de boutons, permettant des actions simples. L’analyse des 35h de vidéos de moments dans 24 classes de maternelle et de primaire, pendant la programmation des objets programmables par les élèves, met en évidence des difficultés d’appropriation et de compréhension. En maternelle, la fonction effacer n’est pas intégrée. Ainsi, si le programme saisi n’est pas effacé, toutes les nouvelles actions de programmation seront incrémentées à l’existant. Il est alors difficile d’associer le déplacement du robot par rapport à de nouvelles instructions. En élémentaire, la fonction tourner est difficile à appréhender sans une analyse fonctionnelle préalable des organes. La rotation s’effectue par la rotation simultanée des deux roues mais avec chacune un sens de rotation opposée.
L’analyse du corpus identifie que l’exclusion d’une rationalité technique sur les d’objets programmables conduit à des difficultés dans l’exécution des tâches prescrites par les enseignants. L’absence d’une rationalité technique envisagée dans les activités laisse à considérer que l’apparence des objets autorise une approche simple. Or, une approche des objets sans l’intégration d’une culture technique ne permet pas d’avoir une approche rigoureuse (Lebeaume, 2006) dans l’usage.
H2 – L’image numérique en classe d’arts plastiques entre usages et pratique – Franck Leblanc, Université de Montpellier, LIRDEF.
Pourquoi aborder les images numériques dans l’enseignement des arts plastiques dès l’école primaire ? Cette question ne trouvera pas sa résolution dans la seule étude de la nature spécifique de cette image mais bien plutôt dans un dialogue entre cet objet produit et ce qu’engagent les dispositifs technologiques aptes à faire image — et à diffuser l’image — aujourd’hui. Car les objets techniques ne sont pas uniquement « passeurs » neutres, ils transforment la perception que nous avons du monde, en cela ils doivent également être questionnés, tout comme ce qu’ils produisent, car ils contribuent à construire des rapports entre l’individu et la société. La réflexion sera portée ici sur l’objet « image numérique », mais interroger cette image, ce sera donc envisager également les questions de production, de perception, de diffusion et de réception, les questions liées aux dispositifs technologiques qui sont des modes d’écriture et de lecture du monde contemporain.
La notion d’ « objet » est centrale dans l’approche de l’enseignement des arts plastiques, entre objets observés et discutés en classe ou hors de la classe lors de visites, objets créés par l’élève, dispositifs techniques et technologiques manipulés et produisant des images — tablette, appareil photographique, [la question du smartphone ?]. Nécessité donc d’interroger ces pratiques, d’aborder les problématiques liées à la maîtrise technique et technologique dans la formation des étudiants futurs professeurs des écoles. Nécessité également, avec nos étudiants, de mettre en réflexion la portée de l’utilisation de ces technologies dans la construction de l’individu, dans la construction de son rapport au monde, approche donc également sociale et politique de ces dispositifs et des images qu’ils produisent. Voici les problématiques qui sont au cœur de l’interrogation des images numériques et de l’enseignement de leur pratique et de la nécessaire réflexion devant accompagner leurs usages.
Car la question posée plus précisément par l’objet «image numérique», s’incarne à la fois dans le champ de la création artistique contemporaine — et intéresse donc de ce fait les arts plastiques —, mais se déploie également dans l’espace «sans art» des usages sociaux quotidiens de l’image, nécessitant donc d’engager une réflexion sur les récits ainsi construits.
Cette communication, développera une double réflexion à partir de l’objet «image numérique», à la fois comme objet questionné et réalisé dans le cadre d’une pratique plastique en classe, et comme objet issu d’usages et de dispositifs participants à la construction de l’individu, à sa socialisation et donc devant être pour cela nécessairement questionnés et réfléchis dans le cadre de la formation des futurs enseignants.
H3 – Analyse de l’activité des élèves dans une séquence de robotique pédagogique : quel rôle des artefacts utilisés dans l’initiation à l’information en CP ? – Sandra Nogry, Université de Cergy Pontoise, Paragraphe.
Nos recherches portent sur la place et le rôle des objets dans l’activité d’apprentissage des élèves.L’étude que nous proposons a été réalisée dans le cadre du projet ANR DALIE « didactique et apprentissages de l’informatique à l’école primaire ». Elle porte sur l’analyse d’une séquence de robotique pédagogique conçue et mise en œuvre par une enseignante participant au projet. Différentes études ont mis en avant l’intérêt des objets programmables pour faire découvrir aux jeunes enfants les bases de l’informatique ; l’efficacité de séquences de robotique pédagogiques proposées par des chercheurs a été démontrée pour l’apprentissage des concepts de commandes de programmation, de séquence d’instructions, et pour développer des capacités à déboguer et à mettre en œuvre la démarche de résolution de problème, ceci dès la maternelle (Komis et Misirli, 2015; Bers, 2014).
Dans cette étude, notre objectif était d’analyser comment ces objets programmables (des beebots) sont utilisés par les enfants et comment ils participent au développement de concepts informatiques.Dans ce but, nous avons réalisé une analyse de l’activité des élèves dans une séquence de robotique pédagogique. Notre cadre théorique était l’approche instrumentale (Rabardel, 1995). Dans cette approche, l’unité d’analyse est l’activité instrumentée ; ancrée dans une situation singulière (Bationo-Tillon et Rabardel, 2015) celle-ci comporte trois pôles principaux : le sujet, l’objet de l’activité, et l’instrument qui assure différentes fonctions de médiation orientées vers l’objet de l’activité, les autres sujets ou vers soi-même.
Afin de mettre en évidence les genèses instrumentales et conceptuelles qui ont eu lieu pendant la séquence, nous avons procédé à une analyse micro-génétique à partir de vidéos des séances enregistrées en classe (2 heures d’enregistrement). Il s’agissait d’identifier des épisodes durant lesquels on observe l’apparition de schèmes(organisations invariantes de l’action), de capacités, de connaissances nouvelles, puis d’analyser les transformations successives qui ont précédé leur apparition (Kaptelinin & Nardi, 2006 ; DiSessa, 2014).
L’analyse réalisée met en évidence les différentes fonctions assurées par le robot au cours de la séquence d’apprentissage, les schèmes qui lui sont associés,mais aussi la façon dont ces objets programmables prennent place dans un système d’instruments plus large comprenant différents types d’inscriptions. L’analyse met également en évidence les conversions successives qui ont lieu grâce à ces inscriptions. Celles-ci permettent aux élèves de construire des représentations de plus en plus abstraites du programme à implémenter et de prendre conscience du caractère différé de l’exécution d’un programme. Ces différents résultats pourront être illustrés par des vidéos de l’activité des élèves en classe.
H4 – Conceptualisation d’artefacts numériques contemporains par des collégiens : contribution didactique à la modélisation fonctionnelle – William-Gabriel Perez, Université Paris-Descartes, EDA.
La prise en compte des objets numériques contemporains dans l’enseignement de technologie au collège, ainsi que la transformation des contenus qui en résulte restent aujourd’hui d’importants défis pour la didactique de la technologie (Lebeaume, 2011). Toutefois, et en contraste avec l’actualité du sujet, la didactique ne dispose actuellement que de peu de données sur le « déjà là » des élèves à propos du fonctionnement de ces « dispositifs informatiques » (Lagrange & Rogalski, 2017) : quels composants identifient-ils ? Quelles relations établissent-ils entre ces organes ? Quels concepts et quels processus sont identifiés et mis en avant par les élèves ? Tiennent-ils compte du concept d’information et, plus fondamentalement, des processus de traitement ? Bien qu’importantes, la plupart de ces questions trouvent peu de réponses dans les textes issus de la didactique de la technologie et des sciences française. L’objectif de cette communication est d’apporter des éléments de réponses à ces questions.
Cette contribution s’inscrit dans le premier axe du colloque : « Les objets en classe : entre pratique et apprentissages, quelles attentes et quels apports ? ». La communication présente et discute les résultats d’une recherche empirique à laquelle ont participé 245 collégiens, soit 125 élèves de 3e et 120 élèves de 5e (Pérez, 2016). Cet échantillon a été interrogé – sous la forme de questionnaires – sur le fonctionnement d’une part et sur la structure d’autre part de deux dispositifs informatiques : le vidéoprojecteur interactif et le Smartphone tactile. Leurs réponses, soumises à des analyses lexicales et thématiques, nous renseignent principalement sur les processus et les composants identifiés par les élèves. Une partie des résultats provient de la comparaison entre les réponses d’élèves de niveaux scolaires contrastés. Nos résultats sont enfin discutés à la lumière des prescriptions actuelles visant l’enseignement de l’informatique au collège, notamment dans la perspective selon laquelle une conception de plus en plus proche du fonctionnement des dispositifs informatiques permet à l’apprenant de mieux aborder les problèmes d’algorithmique et de programmation (Hoc, 1983 ; Lagrange & Rogalski, 2017 ; Samurçay, 1986).
H5 – Le QR code dans le jeu sérieux LUCIOLE : lien entre le monde virtuel et le monde réel pour le développement de la compréhension orale en anglais à l’école – Coralie Payre-Ficout, Université Grenoble-Alpes, ESPE de l’académie de Grenoble, LIDILEM ; Mathieu Loiseau, Université Grenoble-Alpes, LIDILEM ; Emilie Magnat, Université de Picardie Jules Verne, ESPE de l’académie d’Amiens, CERCLL.
Les objets pédagogiques (Duval 2002) couramment intégrés dans l’enseignement/apprentissage des langues sont très divers : numériques (exerciseurs), physiques comme les flashcards qui permettent de visualiser et/ou conceptualiser ce qui ne peut être apporté en classe, en passant par les médias audio et vidéo. Les professeurs des écoles, quel que soit leur niveau en langue (Delasalle 2008), ont à leur disposition de nombreux objets pour proposer un maximum d’input aux élèves. Nous proposons ici d’utiliser les QR codes comme un objet pédagogique faisant le lien entre d’autres “objets” et montrer cet usage dans l’enseignement/apprentissage des langues à l’école.
Notre proposition est mise en œuvre dans le cadre d’un jeu appelé LUCIOLE ciblant la compréhension orale en anglais pour des élèves de cycle 2 et 3. Ce projet est une partie du projet e-Fran Fluence. Fluence propose une expérimentation longitudinale sur 3 ans, dont l’année 1 atteste de résultats positifs sur les performances des élèves. Actuellement en année 2, nous étudions l’introduction du QR Code comme objet pédagogique.
Les QR Codes ont été intégrés dans le système d’objets de la classe : d’une part, des QR Codes sont disponibles sur un poster (reprenant l’ensemble des suspects de l’enquête à laquelle participe l’élève), mais aussi sur les objets de la classe (mobilier). Dans les deux cas, nous utilisons la capacité intrinsèque au QR Code d’agir comme une passerelle entre le monde synthétique du jeu et le monde physique de la classe (Loiseau et al. 2014). En effet, le QR Code, objet mystérieux et illisible par l’humain, est utilisé par l’apprenant lui-même et lui permet de déclencher dans le jeu des interactions à partir d’éléments du monde physique (déclenchement de rétroactions). Toutefois, il convient de différentier ces deux usages du QR code, dans le premier (poster), le QR code est conçu comme une manière d’impliquer l’enfant, de faire pénétrer la classe dans la métaphore ludique de l’application, dans le second (scans d’objets réels), il a pour vocation d’affranchir l’enfant de la nécessité de passer par une représentation des objets et concepts à nommer et d’associer directement le signifiant à l’objet physique correspondant (lexique, prépositions). Enfin, l’application est conçue pour permettre à l’enfant de manipuler ces objets en autonomie, à son rythme et ainsi compléter les activités de groupes réalisées dans la classe.
Nous discuterons les premiers résultats liés à l’usage du jeu par environ 350 élèves de CE1 de l’académie de Grenoble pendant une période de 10 semaines (débutant fin janvier 2019). L’analyse prendra en compte tant les retours des enseignants (questionnaires) que les résultats obtenus par les élèves (pré et post-test,traces d’interactions). Il s’agira de préciser le rôle et la fonction pédagogique et didactique du QR Code.