LA LUTTE CONTRE LE RUISSELLEMENT ET L’EROSION DES SOLS
Marie BUSSIERE (*)
La mise en place d’un programme anti-érosion est assez complexe, elle ne peut se faire sans adhésion de nombreux partenaires (agriculteurs, ingénieurs, élus, techniciens, chercheurs...).
Les principes qui peuvent être retenus pour limiter efficacement l’érosion sont :
- identifier d’abord les différentes zones suivant les processus dominants, tant du point de vue de la formation du ruissellement que l’érosion elle-même (travail à l’échelle du bassin versant, unité spatiale de base).
- protéger le sol de l’impact de la pluie
- retarder et réduire la formation d’un écoulement superficiel : augmenter la capacité d’infiltration et la capacité de stockage - accroître la protection et la résistance des zones où les conditions morphologiques peuvent favoriser l’incision
- réduire les capacités de détachements et de transport du ruissellement en limitant sa vitesse et sa concentration.
Les solutions se situent donc à plusieurs niveaux. Dans les parcelles agricoles, elles sont à mettre en oeuvre par les agriculteurs eux-mêmes, conseillés par les organismes professionnels (chambre d’agriculture...). Hors des parcelles agricoles, elles relèvent d’une gestion collective, mise en oeuvre avec l’aide des directions départementales de l’agriculture et de la forêt, s’il s’agit du domaine rural, et des directions départementales de l’équipement, s’il s’agit de protéger le domaine urbain. Deux types de mesures complémentaires pourront ainsi être mises en place :
- des mesures agronomiques
- des mesures hydrauliques
Les moyens à mettre en oeuvre contre l'érosion (d'après DERANCOURT, 1994)
1- Les moyens de lutte dans les régions de grande culture
1.1- Les mesures agronomiques
1.1.1.- Diminuer l’impact des gouttes de pluie
A- La simplification du travail du sol : le non labour
La suppression du labour peut permettre dans certains cas de limiter l’impact des gouttes de pluie et de réduire très nettement le ruissellement. La persistance de résidus végétaux en surface protège trèd bien la surface du sol (effet de mulch). Cette pratique entraîne également la persistance du profil du sol de zones continues, plus ou moins profondes, ce qui augmente la résistance du sol vis-à-vis de l’incision des couches superficielles. Cependant, cette pratique a parfois des inconvénients. La quantité totale d’eau ruisselés est parfois plus élevée en non travail en raison d’une plus faible rugosité de surface qui entraîne une plus faible rétention superficielle. Le non enfouissement des résidus de récolte empêche également la restitution de la matière organique dans le profil du sol. Le non labour, enfin, ne permet pas la suppression des traces de roues (parfois nombreuses sur les parcelles de betteraves, maïs, pomme de terre, récoltées souvent dans de mauvaises conditions), ceci favorise le démarrage rapide du ruissellement.
Pour conclure, la suppression du labour semble très efficace aujourd’hui contre l’érosion hydrique de type rill-interrill (rigoles parallèles et peu espacées) ; elle semble l’être un peu moins dans un contexte où prévaut l’érosion par ruissellement concentré (rigoles et ravines très espacées). (BOIFFIN, 1991). Pour la bonne application de cette méthode, il faut donc tenir compte de l’existence au sein d’un bassin versant de sous unités spatiales ayant des rôles différents vis-à-vis de l’hydrologie de surface et de l ’érosion.
B- Le paillage et le non déchaumage
Le paillage permet de lutter efficacement contre l’impact des
gouttes de pluie (effet splash). Il constitue un rideau protecteur et crée
une rugosité de surface qui divise et ralentit la lame d’eau de
ruissellement, les pertes en terre sont ainsi considérablement réduites.
Effet du paillage sur le ruissellement et les pertes en terre
(d'après MANNERING, 1960)
Ce paillage peut être naturel ou artificiel. Il peut être mis en oeuvre par la technique du non déchaumage. Pendant l’interculture, il peut s’écouler une longue période durant laquelle le sol reste parfois sans protection (par exemple entre une culture de blé récoltée en août et une culture de maïs semée en avril-mai). Le non déchaumage consiste alors à laisser le chantier de récolte en l’état et reporter le labour au printemps. Le paillage est assuré par les pailles de blé broyées. Selon OUVRY, le non déchaumage est un excellent moyen de lutte pour les situations
- de fortes pentes et de rupture de pente
- dans les secteurs de passage d’eaux inévitables (fond de vallée
sèche et zone de ravinement annuel).
Taux de couverture nécessaire pour réduire la concen-
|
Ce paillage peut être naturel ou artificiel. Il peut être
mis en oeuvre par la technique du non déchaumage. Pendant l’interculture,
il peut s’écouler une longue période durant laquelle le sol
reste parfois sans protection (par exemple entre une culture de blé
récoltée en août et une culture de maïs semée
en avril-mai). Le non déchaumage consiste alors à laisser
le chantier de récolte en l’état et reporter le labour au
printemps. Le paillage est assuré par les pailles de blé
broyées. Selon OUVRY, le non déchaumage est un excellent
moyen de lutte pour les situations
- de fortes pentes et de rupture de pente - dans les secteurs de passage d’eaux inévitables (fond de vallée sèche et zone de ravinement annuel). Pour que les résidus de culture assurent vraiment leur rôle
protecteur, il faut tout de même que le taux de recouvrement du sol
soit suffisant. Des mesures sous pluies simulées en RFA ont montré
que le taux de couverture doit dépasser 30 % pour réduire
de façon significative, la concentration des eaux de ruissellement.
De plus, à partir de 50 % de couvert, la baisse du coefficient de
ruissellement devient intéressante puisqu’elle est au moins divisée
par deux. |
C- Les cultures intermédiaires
Les cultures intermédiaires sont implantées après les cultures principales et permettent d’assurer une protection des sols dénudés. Deux types de cultures intermédiaires peuvent être utilsées :
- les cultures dérobées, destinées à être récoltées, puis vendues ou autoconsommées
- les engrais verts destinés à être enfouis pour améliorer les propriétés physiques du sol (meilleure stabilité structurale) Leur intérêt pour limiter l’érosion tient :
- à la protection qu’ils assurent au sol quand ils fournissent rapidement une couverture suffisante pour limiter la battance - à l’augmentation de la résistance du sol liée à leur enracinement
- à la rugosité qu’ils peuvent créer en surface.
L’effet protecteur est lié au développement de la masse végétale lors des pluies : il est effectif lorsque les conditions thermiques permettent une croissance très rapide (BOIFFIN, 1986). L’implantation d’un engrais vert peut donc être utile pour limiter les risques de ruissellement et d’érosion si elle est réalisée assez tôt. Des mesures sous simulation de pluies ont permis de démontrer l’intérêt d’une telle pratique. Le sol nu restitue la quasi totalité de l’eau reçue (les courbes de la pluie et du sol nu sont presque parallèles). En sol couvert, on constate un retard important (environ 30 mn) de la mise en oeuvre du ruissellement, mais aussi une infiltration non négligeable qui se poursuit par la suite.
Simulation de pluies (d'après DERANCOURT, 1994)
Le couvert végétal permet également de piéger les sédiments dans la parcelle. Certaines mesures sous simulation de pluies (OUVRY, 1995) ont permis de démontrer qu’un couvert végétal diminuait de 10 à 100 fois la concentration en matières en suspension dans le ruissellement. D’après la figure ci-dessous, on s’aperçoit que la concentration atteint 100g/l sur sol nu et moins de 1g/l sur sol couvert quelque soit l’état de la surface du sol sous le couvert : sol battu ou non.
Influence des cultures intermédiaires sur la concentration en terre des ruissellements (INRA, 1995)
En terme de perte de terre, sur les parcelles expérimentales, cela représente des pertes comprises entre 6 à 10 t/ha sur sol nu et moins de 1,1 t/ha sur sol couvert . Les engrais verts ont aussi d’autres avantages :
- ils contribuent au maintien des sols au niveau des ruptures de pente ou des zones de concentration, à condition de choisir des variétés à système racinaire puissant (OUVRY, 1986)
- ils améliorent la décomposition des résidus de récolte en favorisant l’activité microbienne et biologique du sol
- ils divisent le sol par leurs racines et utilisent les reliquats d’azote à l’automne (diminution de la pollution azotée des eaux) - ils laissent le sol dans un état favorable pour la récolte suivante
- ils demandent peu de temps de travail et peu de moyens financiers et améliorent très nettement les rendements.
Le choix d’implantation est ensuite à raisonner en fonction des cultures précédentes, des caractéristiques climatiques et de la concurrence avec les autres activités (récoltes, ramassage des pailles). Le choix des espèces est à faire en fonction de l’objectif recherché et de la date des semis. Les dates limites d’implantation des différentes espèces dépendent du régime climatique local .
1.1.2 - Favoriser l’infiltration de l’eau
Pour favoriser l’infiltration, il faut maintenir le sol poreux en surface et créer des obstacles ou des barrages au ruissellement.
A- Le travail du sol
Les différentes façons culturales induisent des états de surface qui conditionnent la rugosité du sol, son système de porosité et l’état de tassement. Le travail du sol intervient donc à la fois sur le stockage de l’eau en surface et le régime d’infiltration. L’influence des opérations techniques sur la formation et le volume du ruissellement mérite la plus grande attention.
La préparation des lits de semences
Conserver un maximum de rugosité à la surface du sol permet de retarder et limiter l’apparition du ruissellement. Selon OUVRY, un sol très motteux réduit le ruissellement de 50 à 75 % par rapport à un sol nu. Il y a lieu d’arbitrer entre la nécessité d’avoir un affinement suffisant pour assurer une bonne levée et pas trop poussée pour limiter la vitesse d’apparition du ruissellement.
Influence de la rugosité du sol sur le ruissellement (d'après OUVRY, 1995)
L’état et l’histoire hydriques du sol ont un effet sur la stabilité structurale et sur la vitesse d’apparition du ruissellement. OUVRY (1986), dans le Pays de Caux, considère ainsi « qu’il faut savoir affiner différemment le lit de semence en fonction de la date de semis et donc des risques de pluie et des risques de temps sec ». Si les pluies risquent de survenir rapidement après les semis (cas de semis précoces), un travail grossier permet de limiter le ruissellement. Il a peut d’inconvénients sur le plan agronomique car la pluie favorisera une bonne humectation malgré un contact terre-graine médiocre (AUZET, 1987). Par contre, plus la probabilité de temps sec après le semis est forte (cas des semis tardifs de mai dans le Pays de Caux), plus il faut affiner la ligne de semis. Une telle appréciation prêche surtout pour une bonne connaissance des risques locaux et un arbitrage en conséquence.
Pour laisser des mottes en surface lors des travaux de préparation du lit de semence, certaines conditions doivent aussi être respectées (DERANCOURT, 1994) :
- le travail doit s’effectuer sur un sol bien ressuyé
- il faut limiter les passages et regrouper les outils. On pourra employer pour cela :
- des versoirs qui n’émiettent pas trop le sol
- des roues jumelées ou des roues cages avec une pression réduite des pneumatiques
- des outils à dents vibrantes pour des sols à moins de 18 % d’argile (les outils animés par prise de force pourront être employés sans risques d’ils sont équipés de boite de vitesse permettant de fonctionner à vitesse réduite des retors).
Par la suite, le stockage superficiel de l’eau pendant la période de culture est avant tout lié à la rugosité du lit de semences puisque, sauf dans les cas des plantes sarclées, il n’y aura pas d’opération de travail du sol jusqu’après la récolte. Les traces d’outils et les modelés billonnés (culture de pomme de terre, d’endives par exemple) peuvent favoriser l’écoulement vers des zones de concentration. Il y a donc intérêt à laisser les interbillons irréguliers (mottes, débris). L’affinement nécessaire pour assurer un bon contact terre-graine doit être limité aux lignes de semis (AUZET, 1987). Cela est possible en utilisant un matériel adapté (semoirs sans croskillette entre les rangs). La rupture entre le lit de semence et le reste du profil doit être aussi la moins marquée possible, quelque soit le type du sol : les obstacles au drainage interne favorisent la dégradation de l’état de surface (BOIFFIN, 1986) dans le cas des sols fragiles et diminuent le temps d’apparition du ruissellement dans le cas des sols plus résitants (ROOSE, 1986). Ces remarques plaident encore en faveur d’une réduction du nombre de passages.
Le binage
Cette opération a pour principal objectif de lutter contre les adventices. Elle permet de briser la croûte de battance et de restituer ainsi une certaine capacité d’infiltration au sol. Mais en même temps, le binage ameublit le sol et facilite ainsi l’entraînement des particules par le ruissellement. Du point de vue de l’érosion, l’effet du binage peut être bénéfique si la dégradation de surface est importante et si les risques d’averses violentes sont faibles (AUZET, 1990). Par contre, il est à proscrire ou à envisager avec beaucoup de prudence dans les zones sensibles à l’incision (zones de concentration et fortes pentes). BOIFFIN recommande d’éffectuer le dernier binage sur betterave à une date suffisamment tardive pour que le couvert végétal protège ensuite l’état fragmentaire ainsi créé. OUVRY note que, dans ce cas, la perméabilité peut être conservée pendant toute la durée de végétation.
Le sens du travail du sol
Un travail en travers de la pente peut, dans une certaine mesure :
- retarder l’apparition du ruissellement en augmentant la rugosité dans le sens de la plus grande pente ;
- ralentir l’écoulement en diminuant la pente de son lit.
Cependant, il y a souvent plusieurs pentes du fait de l’existence de talwegs secondaires, parfois très faiblement marqués. Dans ce cas, les lignes de travail perpendiculaires à la pente générale ne seront pas rigoureusement de niveau : le « réservoir » créé par chacun des sillons jouant en quelque sorte un rôle de « barrage », peut déborder en point de concentration où l’écoulement, initialement retardé, pourra acquérir des capacités de détachement et de transport nettement supérieures, causant alors des dégâts importants au sein même de la parcelle où il se forme ou en aval. Sur les pentes les plus faibles (< 3 à 5 %) le travail perpendiculaire à la pente permet de freiner efficacement les ruissellements : c’est à prendre en compte en amont d’une bordure de plateau, dans une zone de genèse du ruissellement, par exemple. Sur pente forte, il peut se poser des problèmes de réglage des outils et de stabilité des engins agricoles. Sur les pentes intermédiaires, l’éfficacité du travail du sol perpendiculaire à la pente doit être appréciée en fonction des risques de rupture du « réservoir » créé par les lignes de travail. Les agriculteurs du Lauragais considèrent ainsi qu’un labour à la charrue de sols riches en argile (> 20 %), effectué perpendiculairement à la pente moyenne de la parcelle, leur permet de faire face à des pluies de 20 à 25 mm tombant en une à deux heures (AUZET, 1987).
Les travaux du sol après récolte
On suggère en général d’effectuer un travail du sol le plus tôt possible après les récoltes pour redonner au sol une capacité d’infiltration. Les choix et les modes d’utilisation des outils sont importants pour fragmenter la surface et créer un modelé rugueux. L’emploi des déchaumeuses à soc permet d’obtenir une surface de sol rugueuse et hétérogène , ce qui permet un stockage efficace des excès d’eau. Par contre, les outils à dents ou à disques ne permettent pas d’obtenir un stockage aussi efficace mais maintiennent d’avantage de résidus un surface (OUVRY, 1986). Les chantiers de récolte et particulièrement ceux qui laissent beaucoup d’empreintes de roues, sont à traiter en priorité lorsque les risques de dégâts dus au ruissellement sont importants , quitte à n’effectuer qu’un travail partiel mais judicieusement réparti au sein de la parcelle (cf. OUVRY, 1986).
Le décompactage ou sous-solage
Nous avons vu précédemment que le passage répété des engins sur une même parcelle provoquait le tassement des sols en profondeur (formation d’une semelle de labour). Ceci se traduit très vite par une augmentation du ruissellement en surface. Pour lutter contre ce processus, on peut utiliser une sous-soleuse. Le passage d’une dent à 60 cm de profondeur permet en effet de faire éclater l’horizon compacté créant ainsi une zone de fissuration et d’infiltration. L’apparition du ruissellement est retardé, le temps de ressuyage du sol diminue. Cependant, la technique du sous-solage n’est pas adaptée à tous les types de sol, certaines expériences dans le Ponthieu (1991-1992) ont montré par exemple, que cette méthode ne convenait pas aux sols limono-sableux . La sous-soleuse ne détruit pas entièrement la zone compacte. Selon LUCE, son efficacité est limitée (25 % de la zone compactée) et ses effets de trop courte durée (un an après le décompactage, l’effet de la sous-soleuse est complètement estompée).
B- L’entretien humidique et calcique des sols
L’ensemble des éléments qui peuvent améliorer la stabilité structurale des sols sont suseptibles de limiter leur sensibilité à l’érosion. Les amendements calcaires et humifères peuvent améliorer la résistance des sols, lorsque leurs teneurs en matière organique et en calcium, sont particulièrement faibles. En améliorant la stabilité structurale, ils limitent la battance et la prise en masse des couches labourées, ce qui augmente les capacités d’infiltration du sol. Les sources de matières organiques peuvent être variées.
C- La rotation des cultures
La rotation des cultures sur une même parcelle permet de réduire l’érosion. Selon NAHAL, elle agit sur la résistance du sol par:
- les apports humifères
- l’action des différents systèmes racinaires sur la structure du sol
- le travail du sol
D- Parcellaire et assolement
La taille et la répartition des parcelles, leur affectation peuvent permettre de réduire l’érosion. En effet, un parcellaire morcelé permet une diversification des cultures le long d’un même versant et favorise l’alternance entre les parcelles où l’eau pourra s’infiltrer et être dispersée et celles où la situation sera plus critique. Une bonne organisation du parcellaire doit permettre d’éviter que des surfaces importantes soient fortement dégradées et génèrent du ruissellement lors de la préparation des semis dans les parcelles en aval. Une telle organisation suppose une concentration entre agriculteurs cultivant des parcelles voisines. Un parcellaire diversifié peut permettre de choisir des assolements en fonction des caractéristiques des parcelles (sensibilité à l’érosion, position sur le versant...). la prise en compte des tels critères impose des contraintes à l ’échelle des l’ensemble d’une exploitation. Il y a lieu de porter une attention particulière au niveau des points critiques :
- les zones de concentration où peuvent se développer les ravines
- les ruptures de pentes convexes en bordure de plateau - les fortes pentes
- les pentes longues.
1.1.3- Réduire les capacités de détachement et de transport
A- Limiter le tassement et les empreintes de roues
Nous avons vu précédemment que le tassement du sol par les engins agricoles est un facteur défavorable. Selon AUZET :
- à faible profondeur, il constitue un obstacle au drainage interne et favorise l’apparition d’un excès d’eau
- en surface, dans les traces non effacées, une infiltration réduite favorise la formation de croûtes sédimentaires. Les risques de ruissellement augmentent fortement avec le pourcentage de surface tassée et le degré de tassement.
Le compactage augmente localement la résistance du sol au cisaillement et le rend ainsi plus résistant à l’incision par l’eau. Cependant, ces zones compactées augmentent et concentrent le ruissellement de sorte que leur rôle est plutôt négatif : les incisions se produisent d’ailleurs souvent au centre, ou en bordure des zones compactées, comme on l’observe pour les fourrières. Il est possible de diminuer les surfaces tassée en choisissant des équipements qui permettent le passage roue dans roue. L’emploi d’équipements spéciaux (roues cages, roues jumelées) pour que le tassement soit moins intense et plus étalé a l’inconvénient d’augmenter la surface tassée et d’inciter l’agriculteur à intervenir dans les parcelles avant que le sol ne soit ressuyé. Enfin, en jouant sur la pression de gonflement des pneus, on peut limiter considérablement le tassement du sol.
B- Compacter les talwegs
Les eaux de ruissellement produites sur une parcelle ont tendance à se concentrer dans les dépressions (talwegs...). Les incisions apparaissent très rapidement dans ces zones fragilisées. Pour lutter contre ce processus, il faut essayer de consolider les zones de concentration du ruissellement.
Schéma et processus simplifié de l'érosion en haute Normandie (d'après BOIFFIN)
Cette consolidation peut se faire par tassement de talweg. La procédure est la suivante : après semis, le fond de vallon est simplement retassé par deux passages supplémentaires du tracteur portant le semoir. La largeur de la bande compactée est d’au moins 6 à 8 mètres. Le semis peut être doublé à condition de la faire au premier passage, il faut prendre soin de retasser exactement la zone d’écoulement. L’avantage de cette solution est qu’elle peut s’appliquer quelque soit la forme sinueuse du talweg. Par contre, lorsque la vitesse d’écoulement dépasse 0,6 m/s les risques d’érosion restent entiers. De ce fait, cette technique convient au fond de vallon dont la pente est inférieure à 2 % et dont la surface ruissselante en amont n’excède pas 50 ha : par exemple, si il y a en amont une parcelle battue. En cas d’orage violent, les dégâts d’érosion sont diminués (OUVRY, 1990). Lorsque ce chenal de terre tassé est inadapté, on peut aménager soit un chenal enherbé, soit un fossé collecteur (mesures hydrauliques).
1.2- Les mesures hydrauliques
Les mesures agronomiques donnent des résultats appréciables, mais souvent insuffisants. La question de la maîtrise du ruissellement déjà formé demeure. Elle relève d’un traitement hydraulique. L’objectif des mesures hydrauliques est de contenir le ruissellement à l’échelle d’un paysage restauré dans ses fonctions hydrauliques régulatrices. Sur l’étendue d’un bassin versant affecté par du ruissellement et du ravinement, il s’agit de s’assurer de la maîtrise du réseau hydraulique de surface. Les remèdes relèvent des techniques classiques du génie rural, les principes sont les suivants :
- limiter la concentration du ruissellement
- organiser l’écoulement des eaux
- protéger les zones où les inondations et les dépôts intempestifs provoqueraient des dégâts importants.
Le dimensionnement des ouvrages hydrauliques nécessite au préalable une bonne connaissance du milieu et un bilan hydrique (occurence et volume du ruissellement, coefficients et débits...).
1.2.1- Limiter la concentration du ruissellement
Différents ouvrages existent pour retenir l’eau, au moins temporairement, dès l’amont du bassin versant, de manière à limiter les débits de pointe, éviter l’incision des zones de concentration et le cas échéant, provoquer la sédimentation des matières solides (AUZET, 1990). De tels ouvrages sont actuellement expérimentés dans l’Aisne, sous la responsabilité de la Chambre d’Agriculture et dans l’Oise, par la DDAF. Dans chacun des cas, la mise en place des ouvrages a été décidée à la suite de dégâts subis par des communes situées en aval des bassins versants. Elle suppose une coopération entre agriculteurs, les élus et les services administratifs.
A- Les plis
La technique s’inspire de celles des banquettes, dont l’objectif est surtout de diminuer les longueurs de ruissellement en créant des obstacles (Ref. photo 21). Les plis de faibles dimensions (hauteur utile : 10 à 60 cm) sont mis en place à l’intérieur des parcelles et peuvent être cultivés.
Exemple de pli (d'après DDAF de l'Oise)
B- Les diguettes
Elles sont mises en place en limite de culture et d’exploitation ou sur les chemins d’exploitation. La DDAF de l’Oise expérimente actuellement deux tyopes d’ouvrages. Les diguettes en matériaux rapportés (découverts de carrières de silice) sont destinées à assurer aux ouvrages une bonne stabilité. En outre, le fait qu’il s’agisse de matériaux différents du sol de la parcelle évite qu’elles ne soient rapidement détruites et augmente ainsi leur durée de vie.
Les autre diguettes sont composées de balles de paille de moyenne densité, ancrées dans le sol par un pieu et reliées entre elles. Les balles doivent être renouvelées tous les ans et réimplantées sur la zone de dépôt de limon de l’année précédente. Ce système léger a également des vertus démonstratives qui peuvent convaincre de l’intérêt de créer ce type de petites retenues. Après une pluie, l’eau stockée est facilement vidangée en relevant l’une des balles de paille. La Chambre d’Agriculture de l’Aisne a également mis en place des digues en matériaux rapportés ; implantées en travers de l’axe du vallon, elles comportent une petite retenue à l’amont. La digue est munie de drains pour éviter la submersion de l’ouvrage. Des débits de fuite doivent en effet être prévus (ouvrages perméables, drains...) pour éviter les débordements dus à un sous-dimensionnement ou à un événement de fréquence plus rare que celui du projet.
D’autres éléments du paysage assurent traditionnellement un certain stockage du ruissellement lorsqu’ils sont disposés en travers de la pente ou d’un axe de concentration. Il peut s’agir notamment :
- des mares
- des retenues collinaires
- des talus
- des routes
C- Les mares
Leur principale vocation était d’abreuver les animaux. Avec l’apparition des citernes, il y a eu de nombreuses suppressions. Cependant, quelques unes sont maintenant créées avec pour fonction le stockage des eaux ruissellées pour protéger l’aval des fortes concentrations ; la financement de leur creusement est parfois assuré par les collectivités territoriales. La surface des mares est de quelques centaines de m2 et leur profondeur est limitée : en Pays de Caux, elle n’excède pas 2 m après curage. Leur capacité de stockage est donc de l’ordre de quelques centaines de m3. Elles permettent de stocker une partie du ruissellement très en amont dans les bassins, d’où leur effet sur les débits de pointe et les risques d’incision. Dans le cas d’une réimplantation, il faut les dimensionner en fonction de la surface et de la nature de leurs impluviums de manière à éviter les débordements.
D- Les retenues collinaires
Ces retenues sont créées dans certaines régions de coteaux pour stocker l’eau afin de faciliter l’irrigation : la sécheresse des années 1986 à 1990 favorise leur développement dans les régions du Sud-Ouest (AUZET). Comme les mares, elles stockent l’eau et les sédiments, surtout si elles sont bien disséminées dans l’espace. La sédimentation compromet leur objectif premier, et compte tenu des masses de sédiments qui peuvent être arrachés à la surface des versants en un seul orage dans ces régions, elles peuvent occasionnellement se combler brutalement.
E- Les talus
Ils ont d’abord un effet sur la topographie, puisqu’ils réduisent les pentes des terres cultivées situées en amont. Ils freinent l’écoulement de l’eau, diminuant ainsi sa capacité de transport et provoquent la sédimentation d’une partie des matières solides. En réduisant la vitesse, ils allongent les temps de circulation, permettant ainsi à une partie de l’eau de s’infiltrer. Ils peuvent correspondre à des affleurements du sous-sol, à une accumulation de la terre transportée par le travail du sol et par le ruissellement et / ou à des anciennse limites. Ainsi, ils soulignent parfois des limites pédologiques. Une haie favorise l’infiltration du fait de son système racinaire. La végétation buissonnante permet en outre d’armer le talus. Mais les haies présentent également d’autres avantages : brise-vent, refuge biologique, aspect esthétique, production de bois. Talus et haies peuvent constituer des éléments du réseau hydraulique : le choix de les consever ou non peut reposer sur l’appréciation de leurs fonctions, comme l’illustre la méthode employée par CERESA :
Sur les coteaux molassiques du Sud-ouest (ADRET, 1987)
Les talus en haut des versants séparent les sols bruns plus ou moins lessivés du haut des croupes des sols squelettiques des versants. Au bas des versants, où leur hauteur dépasse en général deux mètres, ils soulignent la limite entre coteau et vallon et séparent deux terroirs agronomiques et pédologiques difféfrents. Le maintien de ces talus est favorisé lorsque le replat sommital ou la bande alluviale sont assez larges pour y créer une parcelle allongée dans le sens de la crête ou du ruisseau. Dans un certain nombre de cas, il convient de les équiper de collecteurs omu d’y planter une haie et d’installer des tournières aux limites amont et aval de la parcelle sur le versant. Sur les versants, les talus correspondent souvent aux limites de propriété d’un parcellaire ancien : de ce fait, leur longueur est souvent limitée ; leur hauteur est en général inférieure à deux mètres. Si le talus est situé sur une limite de parcelle, il devra être conservé s’il s’agit d’un talus continu, ne présentant pas de zone susceptible de concentrer les eaux. Les talus au sein des parcelles peuvent concentrer le ruissellement à l’une des extrémités ; cependant, leur suppression crée en général une zone où le ruissellement naîtra rapidement du fait du compactage du sol par les engins de terrassement et de la moins bonne stabilité structurale du sol au niveau des anciens talus. Dans le cas d’affleurement localisés d’une roche mère peu perméable, le risque de formation du ruissellement en un point est le même : il est souhaitable de diviser la parcelle à ce niveau par une bande végétalisée qui constituera un frein efficace pour le ruissellement.
En Bretagne, CERESA, 1987
Le CERESA utilise une classification mise au point par BAURY J. et BUREL F. reprise également sur cartes de propositions de maillage réalisées au 1/5000. A partir de ces cartes et d’une interprétation du paysage sur le terrain, il est possible d’identifier les unités de fonctionnement du point de vue de la circulation de l’eau. La figure ci-dessous fournit un exemple : les talus qui retiennent l’eau qui a ruisselé sur le versant et les fossés qui évacuent cette eau vers les vallons permettent de définir trois unités (A,B, et C sur la figure). Considérons l’unité A : si le talus 2 est conservé et le talus 3 arasé, le talus 2 continuera à concentrer le ruissellement qui provoquera l’incision d’une rigole au centre du talweg.
Circulation de l'eau et contrôle de l'érosion dans un paysage de bocage (d'après CERESA, 1987)
Certains risques doivent tout de même être mentionnés avec les talus :
- dans les cas des talus bordés de fossés, l’arasement du talus et le comblement du fossé n’empêcheront pas l’eau de continuer à s’accumuler à cet endroit et; n’étant plus canalisée vers un autre fossé, de se déverser sur la parcelle aval.
- l’eau qui arrive sur le replat amont d’un talus peut l’entamer si celui-ci est fragilisé par une mise en culture jusqu’à son rebord; elle peut aussi se concentrer :
- vers les bords si le talus est discontinu - dans les parties en creux
- dans les galeries dues aux rongeurs ou aux racines des arbres morts.
Cette concentration peut provoquer des ravinements importants, progressant vers l’amont du talus par l’érosion régressive et vers l’aval. De tels phénomènes sont mentionnés pour les talus des chemins creux (POESEN, 1989) et peuvent être à l’origine d’une érosion spectaculaire. Cela ne doit pas donner des arguments pour araser les talus mais inciter au contraire à les protéger :
- en évitant les formations ligneuses linéaires. Les rideaux qui résultent de l’association du talus et de la haie présentent un intérêt pour stocker le ruissellement et sa charge solide et favoriser l’infiltration. Traditionnellement, bien des rideaux barrant les vallons assumaient de telles fonctions.
F- Les chemins ou les routes en travers de la pente ou d’un axe de concentration
Lorsque les gardients de pente sont faibles (2 à 3 %), il est fréquent que les chemins et les routes en travers de la pente soient au moins localement en remblai, créant ainsi des zones de stagnation d’eau et de dépôts des matières solides à la base des parcelles, pouvant atteindre quelques ares à quelques hectares, suivant la taille de l’impluvium en amont et les états de surface du sol. Ce barrage peut être assez positif, s’il n’y a pas de déversement ponctuel provoquant le ravinement des parcelles en aval. Lorsque les gardients de pente sont plus forts et les remblais plus importants, comme c’est le cas dans les coteaux du sud-ouest, l’accumulation d’eau en amont des routes ou des chemins puis son infiltration dans le remblai, là où elles recoupent des petites dépressions peut provoquer des glissements détruisant la chaussée ou le chemin. Dans ce cas, ADRET (1987) suggère d’implanter en amont un fossé de diversion protégé par une haie pour réduire les venues d’eau sous le remblai et un collecteur enterré dans le fond du vallon en amont et en aval de la route. La fonction de stockage est alors réduite.
1.2.2- Organiser l’écoulement des eaux
Pour organiser l’écoulement des eaux on peut avoir recours à trois types d’ouvrages :
- les bandes enherbées
- les fossés
- les drains
Le choix entre les différentes méthodes peut être effectué en fonction des pluies annuelles, de la superficie du bassin versant et de la pente du talweg.
A- Les bandes enherbées
Leur fonction est d’acheminer l’eau en évitant l’incision. Elles sont mises en place au sein d’une même parcelle agricole et doivent être traversées lors des opérations culturales, en prenant la précaution de relever les outils. Les lignes de travail du sol et les traces de roue doivent diriger le ruissellement jusqu’à la bande : toute fourrière ou dérayure en bordure de la bande annulerait l’effet recherché et risquerait de s’inciser. Elles sont implantées dans l’axe du talweg. La largeur de l’emprise au sol nécessaire est de 3 à 12 m. On les profile pour obtenir un léger creux de 30 cm en moyenne de manière à éviter un rehaussement trop rapide du fait des sédiments piégés. Pour la même raison, la pente de la bande enherbée doit être la plus constante possible.
L’enherbement est assuré en semant une graminée résistant bien au déchaussement, à une densité plus élevée que pour un herbage (environ 40 kg/ha). Il est réalisé à une période où l’herbe poussera rapidement (de mars à juin et fin août à début septembre dans le Pays de Caux). Les meilleurs résultats ont été obtenus avec des variétés à gazon (mélange de Ray-grass anglais et de Fétuque rouge traçante ou demi-traçante). Les bandes enherbées sont particulièrement adaptées aux bassins sans chenal permanent des plateaux, quand les pentes sont faibles (< 5 %). Elles peuvent être implantées sur des longueurs de plusieurs centaines de mètres. Elles constituent donc une solution efficace pour l’amont des bassins et peuvent être relayées à l’aval par un fossé.
Les risques de sédimentation sont importants si les versants de part et d’autre fournissent des sédiments. Pour leur assurer une durée de vie, il faut donc essayer de limiter le plus possible le ruissellement sur le versant. Une bande enherbée exige que l’agriculteur travaille la parcelle perpendiculairement à l’axe de la bande : travailler de manière oblique pose trop de problèmes, travailler parallèlement revient souvent à déplacer le problème de l’incisison, qui se produira dans la dérayure en bordure de la bande. Si cette solution est envisagée, la plus grande dimension de la parcelle doit être perpendiculaire au talweg.
B- Les fossés
Leur fonction es d’acheminer l’eau. Ils n’ont pas pour vocation de retenir les sédiments : il faut donc les protéger des apports extérieurs, par exemple par une bordure d’herbe de faible largeur et éviter que leur profil ne favorise les dépôts. Pour une emprise au sol du même ordre de grandeur que la bande enherbée (5 à 6 m de large), un fossé est capable d’évacuer des débits plus importants compte-tenu de sa section. Mais il nécessite un entretien plus coûteux (curages) et constitue un obstacle infranchissable par les engins. De ce fait, le fossé collecte principalement le ruissellement de la surface alimentant son point amont. En effet, il est en général bordé par une dérayure et éventuellement une fourrière et ne peut collecter l’eau qui arrive latéralement, sauf si des passages sont aménagés. Fourrière et dérayure risquent de s’inciser si elles deviennent des axes de concentration. La construction d’un fossé doit respecter certaines règles :
- la continuité hydraulique des écoulements doit être assurée,
- les débits évacués doivent être compatibles avec ceux que peuvent supporter les réseaux de collecte des eaux pluviales en aval, notamment dans les zones urbanisées. Si ces deux conditions ne sont pas remplies, la construction du fossé ne ferait qu’aggraver les problèmes en aval.
- les débits de projet doivent tenir compte du coefficient de ruissellement des surfaces qui alimentent le fossé : les débordements provoqueraient des ravinements ou des affouillements ;
- dans les sols fragiles comme les terres limoneuses, le profil en travers doit être évasé (> 1/1) pour éviter l’affouillement des berges ;
- le fossé doit être stabilisé par un enherbement ou un enrochement dans le cas des pentes fortes ;
- une bande enherbée doit être implantée sur 30 à 40 cm de large le long des bords, pour éviter leur destruction par les engins ou les outils et filtrer le ruissellement, car le fossé n’a pas vocation à recevoir de grandes quantités de sédiments ;
- le curage des fossés doit être effectué chaque fois que nécessaire, en évitant cependant les périodes où les risques de ruissellement sont élevés, car le curage mécanique détruit la végétation qui stabilise le fossé et celui-ci pourait alors se transformer en ravine.
L’implantation d’un fossé exige une limite de parcelles. Dans le cas d’une restructuration parcellaire, la plus grande longueur doit être sur la limite du fossé pour favoriser un sens de travail parallèle au fossé et éviter que le ruissellement provenant des surfaces de part et d’autre ne se concentre dans une fourrière.
C- Les drains
Dans certains cas, un drain peut constituer une alternative au fossé. Il évite de créer un obstacle infranchissable. Cette solution a été proposée par ADRET (1987) dans le cas de microdépressions ou en exutoire de fossé sur les versants en pente forte des coteaux du Su--Ouest, pour éviter de trop réduire la taille des parcelles. On leur associe tous les 50 m des cheminées d’infiltration obtenues en comblant localement la tranchée avec des matériaux filtrants (pierres concassées, graviers). Lorsqu’un aménagement du talweg (bande enherbée, fossé) n’est pas prévu, il vaudra mieux privilégier le recoupement du talweg par plusieurs limites de parcelles, de manière à favoriser une diversité des états de surface et à éviter les situations où l’ensemble de la zone de concentration se trouverait ameublie au même moment (AUZET, 1990).
1.2.3- Protection rapprochée des zones sensibles contre les dégâts
Les bassins d’orage (ou bassins de retenue), auxquels on associe parfois des bassins décanteurs, sont les principaux ouvrages de protection rapprochée (AUZET, 1990). Ils ont pour fonction de réduire les pointes de débits et ainsi de laminer les crues. Leurs volumes sont en général important, de l’ordre de quelques milliers à quelques dizaines de milliers de m3. Ils sont souvent envisagés comme le principal moyen de protéger les agglomérations sont le réseau de collecte des eaux pluviales enterré est sous-dimensionné et difficile à modifier. Depuis les années 1980, leur construction se développe dans de nombreux départements avec l’aide financière des Conseils Généraux, notamment en Seine-Maritime et en Ile de France. Ils sont coûteux (> 100 F par m3 stocké et plusieurs milliers de francs par ha de bassin versant). La présence de ces bassins diminue les risques d’inondation (PAPY, 1988). Cependant, leur localisation à la limite entre les terres agricoles et les zones urbanisées fait qu’ils n’ont aucun effet ni sur le ruissellement, ni sur l’érosion en amont. Les coûts d’entretien, notamment les curages (estimés par l’AREAS à 5 à 15 % de leur coût initial), peuvent grever de manière importante le budget des communes. Si l’entretien n’est pas réalisé comme c’est parfois le cas, les dégâts risquent d’être particulièrement importants, le jour de la crue décennale pour laquelle ils sont généralement prévus. Il est donc intéressant de leur associer des mesures visant à limiter la formation du ruissellement et le transfert des sédiments dans les terres agricoles. Les ouvrages ne doivent pas être réalisés sans respecter un certain nombre de règles (concernant notamment les débits de fuite) et de précautions pour éviter tout risque de pollution des nappes phréatiques : en région Karstique, comme le Pays de Caux par exemple, la présence des bétoires dans certains fonds devrait interdire d’y implanter des bassins d’orage (AUZET, 1990).
(*) extrait de :
BUSSIERE M. (1996) - L'érosion des sols cultivés en France: manifestation, coûts, remèdes. Mém. D.E.S.S., Univ. Picardie Jules Verne, 136 p.
mise en forme: Jacques.beauchamp@sc.u-picardie.fr