L'ASSAINISSEMENT
COLLECTIF
Introduction: Rapport au
Conseil
économique et social des Nations Unies (10 décembre 2004)
L’objectif concernant l’assainissement qui figure dans le Plan de
mise en oeuvre du Sommet mondial pour le développement durable
ou le Plan de
mise en oeuvre de Johannesburg reflète un fort engagement
politique des
gouvernements à réduire sensiblement, avec l’appui de la
communauté
internationale, la proportion de ersonnes qui n’ont pas accès
à des services
d’assainissement de
base. L’assainissement commence à être
considéré comme une priorité
nationale en matière de développement, qui requiert des
politiques et
des crédits
budgétaires adéquats. Il est indispensable de consacrer
des investissements aux
installations sanitaires et au traitement des eaux usées, ainsi
qu’au
renforcement des
capacités et au transfert de technologies. Il faudra donc
probablement
mobiliser d’importantes ressources supplémentaires, qui
devraient aussi
permettre aux établissements chargés des eaux et des
égouts d’améliorer
leurs services et de les étendre aux populations non desservies.
D’après les données les plus récentes, entre
1990 et 2002, le taux de
couverture est passé de 49 % à 58 % de la population
mondiale, plus d’un
milliard de personnes ayant été raccordées pendant
cette période. En dépit de
ces progrès, plus de 2,6 milliards de personnes n’avaient
toujours pas
accès à des services d’assainissement de meilleure
qualité, proportion
qui était auparavant estimée à 2,4 milliards.
1. Pourquoi
assainir?
L'urbanisation actuelle se traduit par une forte
concentration d'êtres vivants avec
adduction
d'eau et
Les eaux usées comprennent:
les eaux ménagères
les eaux vannes (W.C.)
les eaux d'arrosage, jardins,
les eaux industrielles
Elles doivent être traitées avant d'être rejetées dans le milieu naturel: rivières, mer, sols.
Caractères des eaux usées domestiques (non industrielles)
La pollution des eaux usées est produite par
des matières minérales et
organiques, indésirables
ou toxiques qui sont en suspension, en solution, en émulsion.
Les matières en
suspension produisent un trouble: la
turbidité. Ce sont:
- des matières minérales :
sables,
argiles, particules
solides insolubles
- des matières organiques :
débris
organiques divers,
organismes et micro-organismes
Les matières en solution et
émulsion sont:
- des sels de métaux (dont
métaux
lourds)
- des composés organiques:
détergents, solvants, pesticides,
matières grasses, hydrocarbures...
La
charge
polluante est importante dans les eaux usées, mais
également dans les eaux de ruissellement en ville (entrainement
des débris de pneus et des hydrocarbures sur les
chaussées, des débris
accumulés sur les toitures...) La pollution induite est de
trois types:
- Pollution
physique: élévation de température
- Pollution
chimique: composés chimiques indésirables
- Pollution
bactériologique: coliformes et
streptocoques fécaux, micro-organismes pathogènes
variés (dont virus).
Il faut donc traiter ces eaux pour lutter contre la pollution des milieux naturels où elles sont déversées.
2. Comment
assainir?
2.1. Les réseaux d'assainissement
Les eaux usées sont collectées sur le lieu de leur production pour être acheminées par un réseau de conduites vers la station dépuration. Le réseau collecteur est dit séparatif quand il n'achemine que les eaux usées ou unitaire quand il achemine aussi les eaux pluviales.
2.2. Les Stations
d'Epuration (STEP)
Une
station d’épuration est
installée généralement à
l’extrémité d’un réseau de collecte. Elle rejette
l'eau épurée dans le milieu naturel (trés souvent
une rivière ou la mer). Elle rassemble une succession de
dispositifs, empruntés tour
à tour par les
eaux usées. Chaque dispositif est conçu pour extraire au
fur et à mesure les
différents polluants contenus dans les eaux.
L'élimination partielle ou totale de la charge polluante se fait
généralement par
traitement biologique, au besoin par traitement
chimique
pour les effluents industriels, souvent
à la suite d'un
traitement biologique.
Les différents types de stations d'épuration
dépendent du procédé d'épuration principal
utilisé et des dispositifs mis en oeuvre. Pour traiter de grands
volumes d'eaux usées, les plus répandues sont les
stations à boues activées et les stations à
biofiltres ou à lits bactériens. Les stations
phusico-chimiques sont surtout utilisées pour épurer des
eaux de sites industriels.
Les stations à boues activées
Les principales étapes sont les
suivantes.
Principe de fonctionnement d'une station d'épuration à boues activées. |
STEP à boues activées en milieu rural (à gauche le bassin d'aération, à droite le clarificateur). Les eaux traitées sont infiltrées dans les deux bassins d'infiltration (au fond, à droite). |
Le
relevage
On se sert de pompe de relevage pour le transport des eaux usées
vers la
station d'épuration, lorsque ces dernières arrivent
à un niveau plus bas que
les installations de dépollutions. On peut également
trouver des vis
d'Archimède.
Vis
d’Archimède pour relevage
Les
prétraitements
Les prétraitements servent
à éliminer les éléments les plus grossiers,
qui pourraient gêner les
traitements ultérieurs et endommager les
équipements.
Le
dégrillage
consiste à faire passer les eaux
usées au travers
d’une grille dont les barreaux
retiennent les
éléments les plus grossiers. Après nettoyage des
grilles par des moyens
mécaniques, manuels ou automatiques, les déchets sont
évacués avec les ordures
ménagères. Il peut être suivi d'un tamisage qui sépare les
débris plus fins.
Dégrillage
dans une petite station
(500 équivalents habitants) et une
grande station (1 million équivalents habitants).
Le
dessablage
débarrasse les eaux usées
des sables par sédimentation.
Le dégraissage ( ou déshuilage) élimine la présence de graisses qui pourraient gêner l'efficacité des traitements biologiques qui interviennent ensuite. Le dégraissage s'effectue par flottation. Les graisses sont raclées à la surface, puis stockées avant d'être éliminées (mise en décharge ou incinération). Elles peuvent aussi faire l'objet d'un traitement biologique spécifique au sein de la station d'épuration.
On enlève ainsi de l’eau
les éléments grossiers et
les sables de
dimension supérieure à 200 microns ainsi que 80
à 90 % des graisses
et matières flottantes (soit 30 à 40 % des graisses
totales).
Le
traitement biologique
Les principes de fonctionnement
diffèrent suivant que l’objectif
est de
traiter le carbone ou le carbone et l’azote et/ou le phosphore : en
pratique, il s’agit de permettre la sélection des espèces
de bactéries
capables soit de transformer le carbone en CO2, soit de
transformer
l’azote en nitrates puis les nitrates en azote gaz (N2),
soit
de stocker le phosphore. Les bactéries ne sont pas fixées
sur un support mais elles sont dispersées dans l'eau
usées: on parle de cultures libres.
L'élimination du carbone des matières organiques se fait dans un bassin d'aération. Les bactéries se multiplient dans des bassins alimentés d’une part en eaux usées à traiter et d’autre part en oxygène par des apports d’air. Les bactéries, en suspension dans l’eau des bassins, sont donc en contact permanent avec les matières polluantes dont elles se nourrissent et avec l’oxygène nécessaire à leur assimilation. Elles transforment les matières organiques en CO2 et H2O. Elles forment des amas en suspension dans l'eau appelés "flocs" dont l'accumulation donne des boues.
La clarification
La
séparation de l’eau traitée et de
la masse des
bactéries (les « boues ») se fait dans
un bassin
appelé "clarificateur".
Pour conserver un stock constant et suffisant de bactéries dans
le bassin de
boues activées, une partie des boues extraites du
clarificateur est
renvoyée dans le bassin. L'autre partie de ces boues,
correspondant à l’augmentation
du stock est évacuée du
circuit des bassins d’aération
et dirigée vers les unités de traitement des boues :
cette fraction des boues
constitue les « boues en excès ».
Un
clarificateur
(STEP de Pierre Bénite, Sud de Lyon)
Le
traitement de l'azote et du phosphore
Azote. L'azote
est contenu
principalement dans les protéines de la matière
organique: le traitement biologique se fait par nitrification de
l'ammoniaque en
milieu aérobie puis réduction des nitrates en milieu
anoxique qui sont transformés en azote gazeux.
Phosphore. Il
est
apporté par les détergents industriels, les produits de
nettoyage. La déphosphatation
peut être faite par
précipitation chimique des phosphates sous forme de phosphate de
fer insoluble.
La désinfection
Dans certains cas, en particulier lors
d'un rejet dans un milieu sensible, l'eau traitée passe devant
des tubes à U.V. qui détruisent la fraction
microbiolologique.
Les stations à biofiltres ou à lits
bactériens
Le principe de ces procédés consiste à
faire
percoler l’eau à traiter à
travers un matériau sur lequel se développent les
bactéries qui
constituent alors un biofilm
sur ce support ("cultures fixées").
Le type de matériau varie suivant les procédés :
• les lits bactériens utilisent des galets ou des supports
alvéolaires,
• les biofiltres utilisent des
matériaux de
plus petite taille : des argiles cuites, des schistes, du
polystyrène, des
graviers ou des sables.
Les biofiltres permettent
généralement des
traitements plus intensifs et plus poussés que les lits
bactériens classiques,
plus rustiques dans leur conception et dans leur exploitation.
L’avantage des biofiltres est de pouvoir
traiter les matières polluantes carbonées et
éventuellement azotées, dans un
volume beaucoup plus faible que dans le cas de procédés
à cultures libres, avec
des rendements similaires, mais ils
sont
plus coûteux en investissement et plus délicats en
fonctionnement
Les
stations
physico-chimiques
Elles sont adaptées aux effluents industriels.
Les traitements dépendent des caractères des eaux
produites. En
particulier les
particules
dispersées sont agglomérées par adjonction
d’agents coagulants et floculants
(sels de fer ou
d’alumine, chaux...). Les amas de particules ainsi formés, ou “flocs”, sont ensuite séparés
de l’eau par décantation
ou par flottation.
2.3 Autres procédés d'épuration
Ce sont des dispositifs plus simples
qui utilisent le pouvoir d'épuration des milieux naturels mais
qui ne peuvent être utilisés que pour des volume d'eau
usées faibles et des surfaces d'installation plus importantes.
Ils sont bien adaptés aux petites aglomération rurales.
3.
Les
boues d’épuration
Le traitement des eaux usées en station d'épuration
produit une eau épurée,
rejetée dans le milieunaturel, et un concentrat
désigné sous le terme de "boues" ou "boues
résiduaires".
Les boues physico-chimiques sont produites dans les stations
physico-chimiques. Les floculants minéraux ajoutés
participent pour une part
importante à la quantité de boues produites.
Les boues dites primaires résultent de la simple
décantation des
matières en suspension contenues dans les eaux usées
brutes. Elle
ne sont pas stabilisées.
Les boues secondaires sont formées à partir de la
charge polluante
dissoute utilisée par les cultures bactériennes libres ou
fixées en présence
d'oxygène (aération de surface ou insufflation d'air).
Les lagunes produisent des "boues de lagunage". Les boues
s'accumulant peu à peu au fond des bassins sont curées
annuellement, ou tous
les deux ans, dans la première zone d'accumulation des
dépôts, et une fois tous
les cinq ou dix ans pour les autres bassins.
Donc, en parallèle du
circuit de traitement
de l'eau, les usines de dépollution comportent également
une chaîne de
traitement des boues. Le but du traitement des boues est de stabiliser
ces
boues (les rendre inertes) par un moyen qui peut-être physico-chimique
avec par exemple de la chaux, ou biologique en laissant
séjourner la boues
dans des "digesteurs" (gros stockeur chauffé et brassé en
anaérobie).
Le traitement comprenant ensuite des ouvrages de décantation (on
parle alors
d'épaississement), de stockage et de déshydratation
(presse, filtre-presse,
centrifugeuse), voire de séchage, la valorisation en biogaz,
ou même d'incinération.
Les métaux en solution dans l'eau peuvent être
neutralisés : en faisant
varier le pH de l'eau dans certaines plages, on obtient une
décantation de ces
polluants. La digestion des boues produit du méthane
(CH4),
communément appelé gaz de ville, qui lorsqu'il est
produit en assez grande
quantité est utilisé comme énergie (production
électrique, chaudière, etc.), et
de l'hydrogène sulfuré (H2S),
qui peut
provoquer des asphyxies en milieu confiné.
Lorsque les boues
d'épuration sont exemptes
de produits toxiques, on peut les recycler en agriculture moyennant un
conditionnement propre à faciliter leur manutention et leur
entreposage sur
site (traitement à la chaux). Lorsqu'elles sont polluées,
il est
nécessaire de les mettre en décharge.
Une solution élégante pour les collectivités
locales est de les composter avec les déchets
verts ou de réaliser une méthanisation
pour produire du biogaz. Selon les pays, les filières
d'élimination peuvent
varier. En Suisse la seule filière
autorisée maintenant est l'élimination
thermique (usines d'incinération des ordures
ménagères, cimenteries).
Un four pour
l'incinération des boues de station
(STEP de Pierre
Bénite, Sud de Lyon).
|
Une armoire d'autocontrôle |
4. Le contrôle de l'exploitation
5. Taux de collecte, rendement et taux de dépollution
Le
taux de collecte.
C'est
le
rapport entre la pollution, raccordée au réseau, et la
pollution
produite par les agglomérations.
La pollution est exprimée en tonnes de
matières
oxydables par jour, selon la formule suivante :
MO = 1/3 (1 DCO +
2
DBO
5)
Une part importante peut ne pas être
raccordée au
réseau ou ne pas arriver à la station (mauvais
branchements,
mauvais état des réseaux...).
Exemples (Agence Adour Garonne): Taux de collecte 67
%
C'est le premier indicateur d'élimination des pollutions.
Rendement.
C'est le
pourcentage
d'abattement des différents paramètres de pollution. La
réglementation européenne fixe des seuils minima de
rendement mais ces
seuils
peuvent évidemment être dépassés.
matières organiques 79 %
matières en suspension 84 %
azote 45 %
phosphore 45 %
Le principal paramètre est celui des matières organiques.
Taux
de dépollution.
C'est le produit du taux de collecte par le rendement,
calculé sur
les matières organiques.
Soitpour l'Agence Adour Garonne: 67 % X 79 % = 0,53
soit
53 %.
|
Unités |
matières
en suspension (MES) : matières minérales
ou organiques non dissoutes |
mg/l |
matières
organiques présentes sous forme particulaire et
dissoute. |
|
demande
biochimique en oxygène (DBO) |
mg O2/l |
la demande
chimique en oxygène (DCO) |
mg O2/l |
l’azote et le
phosphore |
mg N ou mg P/l |
contaminants
biologiques : |
nombre/ml ou |
6. La
réutilisation des eaux usées
Réutiliser
les eaux usées d'une collectivité consiste
à récupérer les eaux d'égout, les traiter
dans une station d'épuration, les
stocker et, enfin, les utiliser pour des usages variés : en
milieu urbain
(arrosage des parcs publics, espaces verts, terrains de sport,
alimentation des
pièces d'eau et fontaines, arrosage des jardins privés,
chasses des toilettes,
lavage des véhicules, lavage des rues, circuit incendie, ...),
industriel (eau
de refroidissement, eau de procédé ...), agricole
(irrigation de cultures
diverses, maraîchages, arbres fruitiers, céréales,
fourrages, pâturages,
cultures industrielles, forêts) et souterrain (recharge de nappe
souterraine).
Ces usages n'exigent pas de l'eau potable. Cependant la recharge de
nappe
souterraine revient, le plus souvent, à réutiliser
indirectement des eaux usées
pour produire de l'eau potable. On connaît un unique exemple de
production
directe d'eau potable à partir d'eaux usées ; il s'agit
de Windhoek, capitale
de
La
réutilisation des eaux usées (REU) est une
pratique très répandue dans les régions du monde affectées
par des pénuries de ressources en eau. Elle est, par exemple,
très développée
aux Etats-Unis, mais aussi en Asie et dans les pays du Golfe Persique.
Le
bassin méditerranéen est l'une des régions du
Monde où la réutilisation agricole
des eaux usées urbaines est la plus pratiquée. Elle est
largement systématisée
en Israël.
Une mise au point actualisée de l'utilisation des eaux usées pour l'agriculture dans le monde est consultable sur le site suivant:
http://www.iwmi.cgiar.org/SWW2008/
REFERENCES
ADEME - Fiche technique assainissement
Agence de l'eau Artois-Picardie
- Guide de l'assainissement des communes rurales.
Cygler C. (2008) - Traitement des eaux usées. Prêts pour le recyclage? Hydroplus, 184, p. 36-42.
Google Earth earth.google.fr
http://www.eau-artois-picardie.fr/IMG/pdf/guidedelassainissementcommunesrurales.pdf
http://www.siarv.fr/Images/Upload/guide_assainissement.pdf
http://www.carteleau.org/guide/assainissement.htm
http://www.senat.fr/rap/l02-215-1/l02-215-161.html